samedi, mars 24, 2007

Oh, Tony...

Tout accaparés que nous sommes, en France, par l'actualité présidentielle -le premier tour, c'est dans un mois-, on en oublierait presque que le Royaume-Uni aussi s'apprête à changer de dirigeant. En juillet, Tony Blair, le premier ministre, doit céder la place à son successeur désigné, (l'Ecossais) Gordon Brown. Et ce départ annoncé ressemble au dernier tour de piste d'un vieil acteur fatigué.

J'habitais Glasgow en 1997 lorsque le "New Labour" de l'encore juvénile Tony Blair est arrivé au pouvoir, et l'on avait senti une vraie bouffée d'air frais. Encore que les Britanniques n'ont pas la culture du débat politique comme en France. Je m'attendais à des explosions de joie dans la rue comme à la Bastille le 10 mai 1981. En fait tout le monde est allé sagement se coucher après le pub comme un jeudi soir ordinaire. Après tout, il y avait du travail le lendemain. Mais enfin on sentait un vrai enthousiasme, surtout dans l'Ecosse massivement travailliste. Les années Thatcher-Major avaient fait trop de mal à ce pays (Poll tax et compagnie), et puis cela fleurait trop les valeurs morales, le Sud de l'Angleterre, le Daily Telegraph etc...

Avec sa quarantaine fringante, sa femme qui gagnait plus que lui en tant qu'avocate, ses trois jeunes enfants, Tony Blair avait de l'allure. Lors de la mort de la princesse Diana, il avait été plus qu'à la hauteur ("la princesse du peuple", c'était bien trouvé, cf. le film The Queen pour revivre cette période). Je l'ai trouvé vraiment sympathique lorsqu'il a eu un petit dernier inattendu, confessant à peu près "oups, on n'a pas pris nos précautions pendant nos vacances en Toscane".

Il a commencé à déraper en 2002, quand il s'est engagé avec George Bush dans la traque aux hypothétiques armes de destruction massive (ADM) en Irak. Il ne manquait pas encore de panache, à s'opposer à son opinion publique, n'hésitant pas à rencontrer les citoyens lors de débats télévisés où il n'était pas ménagé. Mais sa façon d'invoquer une mission divine, les indiscrétions selon lesquelles il priait de concert avec W, bref sa soudaine posture de fanatique religieux l'a fait basculer du mauvais côté. Cela s'est vu sur son visage, qui s'est durci, ses cheveux ont blanchi, il a pris dix ans d'un coup. Le pire pour moi reste le moment où il a laissé tomber l'expert David Kelly, censé accréditer la présence d'ADM en Irak et acculé au suicide. Et puis bien sûr, il y a eu la débâcle irakienne.

Non vraiment, Tony, tu fais bien triste figure. Nul doute que tu continueras de sillonner le monde en donnant des conférences sur l'environnement ou le développement de l'Afrique, mais ton bilan est irrémédiablement terni.

2 commentaires:

Blue a dit…

Mais aucun successeur potentiel n'est aussi sexy que Tony. On dirait bien qu'on ne peut pas tout avoir dans le même homme... ;)

Pascale Clerk a dit…

C'est sûr que Gordon Brown n'est pas Brad Pitt (ni Ewan McGregor). Mais Tony Blair a pris un méchant coup de vieux ces derniers temps. On sent qu'il a tout le poids du monde sur les épaules, et on le comprend.